Il est difficile de s'affronter soi-même sans complaisance, et ce peut aussi être une opération dangereuse qui confine à l'introspection. Les raisons qui ont poussé bien des peintres à se prendre pour modèle ont été très différentes (à l'époque romantique, quand les peintres ont un statut précaire, ils trouvent dans leur image renvoyée par un miroir un modèle que l'on peut peindre sans frais...).
Par ailleurs, l'artiste ne se représente pas toujours comme il se voit dans le miroir; l'image est "truquée", recomposée, comme le souligne avec humour Norman Rockwell . De plus, une des spécificités de ce genre est qu'il est très difficile, voire impossible, au spectateur de faire la distinction entre portrait - de soi par un autre - et autoportrait - de soi par soi-même.
Les propositions qui vont suivre tentent de mettre l'accent sur ces particularités. On peut, comme amorce, apporter quelques notions d'histoire de l'art tendant à montrer que l'autoportrait en tant que tel n'apparaît qu'à partir de la deuxième moitié du XVème siècle; auparavant, on trouve des portraits "subreptices" où l'artiste donne sa propre figure à un personnage d'une scène, religieuse par exemple: c'est à l'époque de la Renaissance qu'il acquiert un statut individuel, parallèlement à l'émergence de la figure de l'artiste et à l'apparition dans les lettres et la philosophie de la prise en compte de la personne.